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Youssef Touhami, directeur de Volkswagen Maroc à la CAC

« Le Maroc est le troisième pays au monde en terme de vente du Touareg après la Chine et l’Allemagne».

Malgré la morosité du marché automobile et les péripéties de ces derniers mois, la marque Volkswagen affiche une santé insolente et même la meilleure croissance du top-10. Or, sa gamme reste moins large que bien d’autres marques et le prix de ses véhicules bien supérieur à la moyenne. Pour comprendre les raisons de cette réussite, nous avons proposé à son directeur général une séance de questions/réponses.

Driverslife : Quel bilan commercial chiffré faîtes-vous Volkswagen au Maroc ?

Youssef Touhami : Le marché automobile est en baisse à fin septembre, il n’arrive pas à retrouver le rythme de croissance d’avant Covid. Dans ce contexte, Volkswagen s’en sort bien en réalisant une progression de 65%. Notre marque conforte son rang dans le top-5 du marché Marocain. Elle s’adjuge même la plus grosse croissance du top-10 et gagne 2,4% de part de marché supplémentaire que nous sommes partis arracher avec les dents aux concurrents. Nous sommes satisfaits de notre performance et nous remercions nos clients pour leur confiance. Ces résultats sont d’autant plus satisfaisants, qu’ils sont réalisés avec une gamme réduite à 5 modèles à savoir, Golf, T-Roc, Tiguan, Touareg et Caddy. Or, avant le Covid nous en avions 11. Certains modèles ont disparu du catalogue du constructeur comme les Passat, Jetta, Arteon et l’iconique Coccinelle. Concernant la Polo qui était notre best-seller il y a tout juste quelques années, nous avons fait le choix de ne plus la commercialiser au Maroc, combien même elle évolue dans un segment à gros volumes. Nous avons décidé de monter en gamme et de ne pas rentrer dans une guerre des prix avec les marques qui trustent ce segment extrêmement compétitif et dont ils dépendent pour leurs survies à plus de 70% de leurs volumes. De nombreuses expériences passées ont démontré que cette stratégie aboutissait souvent à un avenir très incertain. En les laissant concentrés dans la bataille qui fait rage dans cette catégorie, ils nous ont libéré de l’espace sur tous les autres segments où chaque modèle de Volkswagen occupe l’une des marches du podium. Certes, avec notre gamme, nous couvrons moins de 60% du marché, mais nous consolidons nos acquis en devenant indéboulonnable. À chaque introduction d’un nouveau modèle, le seul leitmotiv est d’être leader. Le dernier exemple en date, c’est le lancement du T-Roc restylé qui, en moins d’un an, est deuxième de son segment juste derrière un modèle lox-cost qui fait presque la moitié de son prix. Tous modèles confondus et hors production locale, les T-Roc et Touareg figurent respectivement aux 6ème et 8ème places des modèles les plus vendus au Maroc en 2023. Mieux encore, le Touareg est non seulement leader de sa catégorie, avec environ 50% de part de marché, mais il réalise au Maroc ses plus grosses ventes après la Chine et l’Allemagne.

Ah bon ?

Tout à fait et c’est une fierté pour nous, le Maroc est le troisième pays au monde en terme de vente du Touareg après la Chine et l’Allemagne. Il y a une réelle histoire d’amour entre la clientèle marocaine et ce modèle, avec un taux de fidélité à faire pâlir de jalousie. Il y a plusieurs clients qui en sont à leur 4éme Touareg et je suis sûr qu’ils répondront présent pour le prochain que nous allons lancer en décembre 2023.

Justement, comment expliquez-vous l’engouement de la clientèle pour les modèles Volkswagen alors que leurs tarifs se situent dans la fourchette haute du segment ?

Il y a un atout qui est indéniable : l’excellente image de marque dont jouit Volkswagen au Maroc. Gardien de cet attribut, nous travaillons au quotidien pour continuellement l’améliorer. La marque a un positionnement à part et nous œuvrons pour lui garder sa particularité qui fait sa singularité. Certes, nous sommes positionnés 20% plus chers que les généralistes, mais nous offrons au minimum 50% de plus en termes de qualité, de performances, de sécurité et de fiabilité. Sans parler d’une expérience de conduite qui n’a rien à envier avec celle des marques dites premium avec qui on fait jeu égal et dont nous sommes moins chers de 10 à 15%. Ce positionnement unique entre ces deux univers automobiles nous permet de capter une clientèle de plus en plus importante. Pour cela, il nous faut rester inventif et agile. Le Covid a accéléré la transition digitale. Du coup, nous avons très vite surfé sur cette vague en proposant une expérience d’achat différente en misant sur le «phygital» et en formant nos équipes aux nouveaux besoins du client. Nous avons pour cela réinventé notre approche commerciale pour qu’elle soit le plus en adéquation avec les nouvelles demandes de la clientèle marocaine que nous avons préalablement bien étudiée et observé sa mutation rapide. L’exemple le plus parlant est le succès du T-Roc à son lancement. Nous avons créé, entre autres, une application personnalisée qui nous a permis d’enregistrer plus de 1.000 commandes avant que le premier exemplaire destiné à la vente ne soit produit. On n’avait que 3 exemplaires avec lesquelles nous avons fait un road show dans tout le Maroc, ce qui était inimaginable avant le Covid. Nos concurrents qui avaient du stock et proposaient des prix inférieurs au T-Roc nous prenaient pour des fous en disant qu’on vendait, comme on dit en arabe, du «poisson dans la mer». Pourtant, c’est bel et bien leur approche commerciale qui était devenue caduque.  

Aujourd’hui, nous livrons une moyenne de 300 T-Roc par mois, sachant que le prix moyen est à plus de 350.000 DHS, alors que nos concurrents directs sont en moyenne 80.000 à 100.000 DHS moins chers, mais réalisent trois fois moins de volumes que nous.

Au demeurant et quel que soit le modèle, une Volkswagen est considérée par la clientèle marocain comme un produit premium. Et cela est aussi un aspect qui explique et justifie l’engouement pour la marque.

Quels sont les facteurs clés liés à ces performances commerciales ?

Chez Volkswagen, il n’y a qu’une seule stratégie : nous adapter rapidement au marché, voir même anticiper ses besoins. Nous ne sommes pas dans les grandes et belles présentations théoriciennes sur Powerpoint. Non, nous sommes sur la forte compréhension du terrain, pour le sentir et mieux prendre en compte les attentes de la clientèle. Cela nous permet d’anticiper et d’être inventif pour avoir toujours un coup d’avance. Dans le cas contraire, on s’essouffle à petit feu et on risque de se faire laminer par la concurrence ou pire encore, se faire sortir par une nouvelle marque qui débarque sur le marché avec de nouveaux produits et arguments. Il faut donc rester très attentif et prêt à réagir. Cet état d’esprit collectif nous oblige de sortir des sentiers battus et de toujours viser les premières marches du podium.

L’autre clé de notre succès, ce sont les grands investissements consentis ces dernières années, qui ont permis à plusieurs structures nouvelles de voir le jour sur tout le territoire national. Cela s’accompagne évidemment par son lot de recrutement de profils jeunes et très motivés.

Comment voyez-vous l’arrivée des marques et voitures chinoises ?

Cette éclosion de labels chinois n’est pas que chez nous. Elle s’opère en Europe d’abord et le Maroc ne fait que subir les prémices de cette déferlante. Il ne faut pas se leurrer : les chinois ont des voitures de plus en plus qualitatives, peut-être pas encore au niveau des européens et des allemands notamment, mais au vu des efforts qu’ils font en termes de qualités, de R&D, ils réalisent actuellement des pas de géant. Du coup et durant ces 5 prochaines années, je pense que les marques qui ne parviendront pas à mieux travailler leurs gammes, à fidéliser les clients et à améliorer la valeur de revente vont subir de plein fouet cette invasion de marques chinoises sur notre marché.

Pourquoi Volkswagen Maroc peine à percer sur le segment des véhicules utilitaires ?

Je ne dirais pas que l’on peine à percer dans ce segment, car là, vous parlez probablement de volumes et de parts de marché. Il se trouve qu’aujourd’hui des marques françaises et italiennes profitent d’un bon positionnement tarifaire sur ce marché et en particulier celui des vans et petits fourgons. C’est aussi le cas pour les marques asiatiques concernant les pick-up. Volkswagen au niveau de sa gamme, n’a pas de produit concurrent. En revanche, sur le marché des gros fourgons destinés aux transports de personnes, nous avons le Crafter qui est en passe de détrôner cette année son seul concurrent historique qui est d’ailleurs aussi d’origine allemande.

Quelles sont vos perspectives pour 2024, en termes de volumes, de nouveautés et d’électrification ?

Pour 2024 nous espérons d’abord que le marché automobile va reprendre. Notre pays a une feuille de route très prometteuse jusqu’en 2030, ce qui va booster l’économie d’ici là et par conséquent augmenter le parc automobile. Notre objectif est de continuer d’avoir une croissance plus forte que celle du marché.

Question nouveautés, nous aurons les nouveaux Touareg et Tiguan. Le premier sera lancé vers la fin 2023, début 2024, tandis que le second n’arrivera pas avant mai prochain. Puis, pour compléter la gamme et proposer un SUV sous la barre des 300.000 DH, nous allons lancer le T-Cross au courant du second semestre 2024. À ce moment-là, nous pourrons reconquérir une clientèle que nous avions avec des modèles comme la Jetta, la Golf 7 et les versions hautes de la Polo.

S’agissant enfin de l’électrification, elle se fera chez nous à l’horizon 2025. Honnêtement, je ne suis pas pressé de lancer la gamme ID, mais 2025 me semble un bon timing, en espérant que les choses aient considérablement bougé sur le marché national de l’électrique et notamment pour ce qui est des infrastructures et des éventuelles subventions gouvernementales que l’on attend. En attendant, nous allons proposer de l’hybride au courant du second semestre 2024 et notamment sur les Touareg et Tiguan, puis un an plus tard sur le reste de la gamme.

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